Qui a volé les clicks de Jean-Baptiste ?

de | 30 août 2016

Criteo a publié le 3 août dernier des Criteo resultats Q2 2016 - procès steel house qui a vole les cookies de jean-baptisterésultats plus que solides et respectables : Revenu : +36%, Résultat Net +240%, Ebitda : +66%. Force est donc de constater que la sulfateuse est loin d’être enrayée et fonctionne toujours à plein régime, cette performance est a saluer dans un marché AdTech où la concurrence fait rage et qui fait face à de nombreux défis structurels (Adblocker, cross-device, fraude…).

Tout à l’air au beau fixe pour Criteo qui domine le marché en revenu généré et par effet de bord en capitalisation boursière (source Business Insider UK).

criteo capitalisation boursiere vs le reste des societes Adtech

Néanmoins au milieu de ces bonnes nouvelles, sur la route de ce rouleau compresseur intraitable, se dresse une sujet plus délicat et dont les conséquences sont très compliquées à anticiper pour Criteo et aussi pour l’ensemble de l’AdTech.

En effet mi-juin Criteo a lancé une action en justice sur le territoire américain à l’encontre d’un de ses concurrents : SteelHouse. Ne cherchez pas pas si vous ne connaissez pas ce dernier il s’agit d’un Retargeter purement US sans implantation en Europe. Criteo accuse SteelHouse de « contrefaçon de click », oui vous avez bien lu, ce qui peut-être interprété également comme du vol de click au détriment de Criteo.

Comment c’est possible ? Toujours selon Criteo, SteelHouse a développé un « petit programme » capable d’intercepter un click réalisé sur une bannière Criteo et de le transformer en click SteelHouse au moment où la visite arrive sur le site de l’annonceur. Techniquement il s’agirait d’une fenêtre invisible qui s’ouvrirait juste après le click et changerait la provenance et donc le tracking de ce dernier. Le préjudice pour Criteo est donc super élevé entre la perte de revenu et la perte de clients (TOMS notamment) lors de compétition (Run) d’AB Testing voyant s’affronter les 2 Retargeters. Les équipes de Criteo ont rencontré plusieurs fois celles de SteelHouse ces derniers mois pour tenter de résoudre ce problème à l’amiable, mais apparement sans succès d’où le lancement de poursuites judiciaires par Criteo.

L’accusation portée à l’encontre de SteelHouse est grave, il s’agit d’une Adtech en pleine croissance ayant levée plus de 60 Millions $. Sa réaction ne s’est pas faite attendre notamment par le post d’un billet sur leur blog et surtout par une réponse formelle de leurs avocats à la plainte de Criteo : Criteo-Vs-SteelHouse short.

En résumé SteelHouse s’étonne de se voir accusé par Criteo de malversation dont ce dernier a lui même été soupçonné pendant un certain temps (mais attention là c’est Radio Moquette qui diffuse les infos) et surtout porte l’estocade en accusant Criteo de générer du trafic frauduleux (sans source identifiée) dans des proportions très importantes (40% à 60%) selon une étude / analyse sur les logs et les pixels de tracking des clicks générés par Criteo  sur 3 clients communs SteelHouse / Criteo (voir les graphiques ci-desssous).

SteelHouse accuse également Criteo de ne pas respecter une des règles « non écrites » de l’Adtech en continuant de recibler des internautes après leur achat sur Internet (ce qui n’apporte rien à l’annonceur mais lui génère des coûts), à elle seule cette pratique représenterait 8% de l’ensemble des clicks générés par Criteo (si c’est vrai c’est énorme).

SteelHouse essaie clairement d’inverser les rôles dans sa réponse à Criteo à un moment où le Sénat Américain s’intéresse au phénomène de fraude publicitaire sur les impressions et sur les clicks.

Attribution des clicks generes par Criteo par source de trafic steelhouse - programmatique

 

Attribution des clicks generes par Criteo par source de trafic steelhouse 2 - programmatique

 

SteelHouse explique que ses soupçons sont fondés sur les Taux de clicks spécialement élevés communiqués par Criteo à l’ensemble du marché, et que cette superformance, notamment par rapport aux mastodontes du secteur Google et Facebook est difficile à justifier de manière rationnelle.
Taux de click CTR moyen Google Facebook Criteo Adroll Steelhouse - programmatique

Ce type de réponse était prévisible, SteelHouse s’estime en forte position de vulnérabilité vs Criteo et à n’a pas les mêmes moyens financiers pour mener ce combat. De plus s’il se retrouvait condamné, il n’aurait surement pas les moyens de payer les sommes demandées, SteelHouse joue donc tout simplement son avenir dans ce procès, ce que Criteo est loin d’ignorer.

Le vrai problème de ce procès ? C’est de jeter l’opprobre sur l’ensemble du marché de l’Adtech déjà malmené sur des questions de privacy ou sur le terrain des Adblockers. Et il n’est pas certain qu’à court terme ce procès profite pleinement à Criteo, notamment pour les raisons ci-dessous :

– Ce procès donne un gros coup de projecteur à SteelHouse qui est peu connu, et dans son cas il faut toujours mieux que l’on parle de vous plutôt que d’être ignoré.

– Criteo quand à lui a peu à gagner à être associé à des sujets de fraude au clicks ou de trafic frauduleux, surtout que vu la complexité du sujet il est très difficile de savoir ce que vont retenir les annonceurs et les agences de toute cette histoire. 

– Dans un marché Adtech chahuté le cours de bourse de Criteo pourrait pâtir de ce procès, car ce dernier entraine une faible visibilité sur la valorisation de Criteo dans les prochains mois et pour 2017. L’action a d’ailleurs chutée de presque 10$ (45$ en juin à 36$ à date) depuis l’annonce des poursuites judiciaires (néanmoins il faut reconnaitre que l’été a certainement aidé cette chute du cours). 

 

Suite au prochain numéro, pour les curieux vous pouvez consulter la réponse de SteelHouse version longue à la plainte déposée par Criteo : Criteo-Vs-SteelHouse Long.

 

Raphael Glatz

 

Une réflexion au sujet de « Qui a volé les clicks de Jean-Baptiste ? »

  1. Phil B

    Les arguments de SteelHouse contre Criteo sont vraiment d’une mauvaise foi énorme, qu’il semble extrêmement facile de les contrer.

    En effet, que disent-ils ?
    Ils ont analysé les logs HTTP de plusieurs clients et que voient-ils ?
    Oh, il y a pleins de requêtes sur lesquelles on ne voit pas le referrer…

    Cela ne prouve en rien que ces clicks ne proviennent pas de Criteo, de SteelHouse ou autre.
    C’est uniquement la faute de certains navigateurs (notamment Safari, mais d’autres aussi, selon les conditions et leur configuration), qui ne renseignent pas ce champs, pour des raisons de « privacy ».

    En même temps personne de sérieux n’utilise plus les logs HTTP pour faire du comptage de clicks ou d’attribution, on utilise plutôt des solutions logicielles (paramètres dans l’URL, cookies, etc). Bref, c’est une tentative futile d’agiter un chiffon rouge… mais l’injection de JS pour faire de faux clicks ça par contre c’est du concret et je peux comprendre l’agacement des gens de Criteo qui se font voler des clients par des script-kiddies de l’adtech.

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