Janvier est le mois ou un grand nombre de médias se prêtent au jeu des prédictions pour l’année qui commence, avec plus ou moins de justesse et des fois de sérieux, néanmoins ces articles ont fréquemment des audiences élevées, chacun d’entre nous étant intéressé d’anticiper les tendances et évènements à venir pour pouvoir au mieux surfer la vague.
A notre tour de sortir la boule de cristal du placard pour essayer d’identifier des perspectives réalistes pour 2016.
Internalisation du Programmatique
La transparence restant un des points faibles historiques du Programmatique, les annonceurs gagnant en maturité et les technologies en mode SAAS délivrant une efficacité grandissante, il faut s’attendre à ce que les annonceurs et spécialement les marchands (en 1er lieu ceux du Top 100) se penchent sérieusement sur l’opportunité d’internaliser des technologies d’achat Programmatique telles que les DSP afin d’avoir une vision complète de leurs campagnes par un pilotage maison 100% aligné avec les objectifs commerciaux et les KPi’s de l’entreprise et également afin de pouvoir activer par eux même la Data issue de leur DMP.
L’internalisation entrainant également l’hébergement des compétences, du savoir faire et de l’historique des campagnes, elle peut se révéler hautement stratégique pour des annonceurs ayant des budgets Display élevés avec une part du Programmatique qui devrait atteindre les 50% au minimum pour 2016. Pour mémoire les achats Programmatiques ont représentés 30% des achats médias display en 2015.
Les MediaMath, AppNexus et consorts devraient donc avoir à répondre à un nombre grandissant d’appels d’offre dans les prochaines semaines / mois. Des indiscrétions du marché nous ont d’ailleurs confirmés qu’un acteur majeur des Télécoms (celui gourmand en acquisition) avait déjà lancé le sien début 2016, tandis que des marchands de l’univers Fashion sont en réflexion active sur le sujet.
Le partage des données entre annonceurs
Autre sujet étroitement lié à la transparence : le partage des données entre annonceurs « voulu / encadré » et non plus « subi / totalement opaque » tel que nous avons pu le traiter dans notre article « La loi du plus fort ».
Dans le monde physique les différentes enseignes d’un même centre commercial (qu’elles soient concurrentes ou pas) se partagent les clients, leurs données de trafic et mutualisent leurs efforts pour mieux réussir ensemble, la diversité de l’offre produits et des services du centre étant clairement à l’avantage des consommateurs.
Problème dans le digital, certains prestataires mutualisent déjà les données de leurs annonceurs (en l’avouant ou pas) mais pour leurs bénéfices propres et non pour ceux de leurs clients. 2016 devrait donc voir l’émergence de briques technologiques dédiées, comme celle d’Hélix de MediaMath dont le lancement a été annoncé il y a quelques jours, ou bien le DSP-DMP Adara spécialisé sur le secteur du Voyage qui pour sûr devrait fortement se développer cette année. Il s’agit pour les annonceurs d’avoir l’opportunité de partager leurs données de trafic, de qualification socio-démographique et de comportement (notamment d’achat) afin d’accéder à des données équivalentes d’autres annonceurs, nous parlons donc de partage de données avérées (et non modélisées) donc hautement qualifiées et 100% justes, le tout en toute connaissance de cause pour les annonceurs qui en retirent un bénéfice direct et business.
Utilisation massive des données 1st Party
Concomitant au partage de leurs données les annonceurs vont se mettre à une utilisation plus intensive de leur données 1st Party (CRM entre autre) rendue possible par l’intégration de leur DMP, l’utilisation des technologies de CRM OnBoarding le tout « driver » par une prise de conscience que la course à l’acquisition n’a que peu de sens économiquement si on néglige la fidélisation des nouveaux clients chèrement acquis ou regagné en campagne de SEA, display, social etc, (voir l’interview de Stéphane Treppoz à ce sujet sur le JDN). L’internalisation de technologies d’achat Programmatique va clairement dans le sens d’une utilisation plus intensive, intelligente et suivi dans le temps des données 1st Party de l’annonceur.
Ce qui revient à innover en quelque sorte car au lieu d’utiliser des technologies Programmatique uniquement dans un cadre d’acquisition, ces dernières vont également pouvoir remplir leurs 2ème job qui est d’exploiter les actifs de l’annonceur et de les faire prospérer.
AdBlocker les éditeurs contre-attaquent
L’appel du GESTE à ses membres leur demandant de bloquer l’accès à leurs sites aux internautes équipés d’Ad Blocker est la 1ère réponse / action concrète des éditeurs pour essayer d’endiguer la déferlante « AdBlock » l’image de ce qu’à fait Bild.de en allemagne et qui a eu un impact positif sur ses revenus publicitaires.
Les éditeurs se sentent « attaqués » par les Adblockers, il est donc logique qu’ils se défendent (et d’ailleurs ils auraient pu se réveiller avant) néanmoins n’oublions pas que les internautes eux-mêmes se sentent également « attaqués et dérangés » par la publicité ce qui entraine l’installation d’un Adblocker… Une réponse uniquement coercitive n’aura donc qu’un impact limité en volume d’internaute « débloqué » et également dans le temps (adoption d’un nouvel adblocker qui ne se fera pas bloquer… ce sera l’histoire sans fin) ; si nos amis éditeurs oublient de traiter la cause du problème liés au format intrusifs vidéo et rich média et également à la lenteur du téléchargement des pages. Cette lenteur étant pour le coup étroitement au nombre de tags présents sur une même page, entre 43 et plus de 70 tags pour des sites médias leader tel que Le Monde, Le Figaro etc…
Donc l’explication par l’exemple n’est pas une mauvaise chose (blocage des utilisateurs d’Adblock) afin d’expliquer que sans pub il ne peut y avoir de presse gratuite et de qualité.
Mais l’explication par la preuve (respect de l’internaute par la suppression, le capping, donc une meilleure maitrise des formats intrusifs ainsi qu’une amélioration du temps de téléchargement des pages) est aussi nécessaire afin de convertir les internautes ayant basculés du côté obscur des Adblocks.
Sinon la dernière solution côté éditeur est de passer à la caisse, comme Criteo, Google et Facebook, mais en étant conscient qu’il s’agit également d’une solution temporaire.
2016 s’annonce passionnant, dynamique et comme toujours assez compliquée pour l’industrie du Programmatique.
Raphaël Glatz